Les septs frères

Opéra comique en quatre actes

Composé en 1913

3332/4331/21/1 cordes, chœurs et solistes

Le texte d’Armas Launis est inspiré du roman Les sept frères (1873) d’Aleksis Kivi

Première le 11 avril 1913 à l’Opéra finlandais. 

Présentation

La volonté d’imposer la langue finnoise a été accomplie dans l’opéra Les sept frères (1913) d’Armas Launis. Launis fut le premier compositeur à mettre la langue finnoise au service du récitatif. Le roman d’Aleksis Kivi, paru en 1870, convenait parfaitement à cet objectif. Launis a essayé de suivre le chant parlé très systématiquement : le discours est fluide et les chanteurs doivent chercher une récitation naturelle et un ton populaire, y compris dans les accents des mots et des phrases.

Personne n’a nié l’intérêt de ce nouvel opéra, mais le traitement parlé des parties vocales a provoqué l’opposition de nombreux auditeurs à cause de l’absence presque totale d’un élément mélodique indépendant. Launis avait en tout cas créé un nouveau langage original dans le drame musical qui n’avait aucun équivalent  international direct. Ainsi le chant parlé des opéras de Leoš Janáček utilise le rythme et la sonorité de la langue seulement comme un point de départ et les élabore musicalement.

Launis fut pionnier aussi en composant, avec Les sept frères, le premier opéra comique finlandais. Les critiques d’époque ont, certes, trouvé la partie orchestrale trop  sérieuse et monotone par rapport aux tournures cocasses du texte. On aurait également souhaité des tempos plus rapides pour les dialogues animés. Launis a écrit lui-même le livret de l’opéra.

En composant Les sept frères, Launis avait pris un risque considérable. Le roman de Kivi est, partiellement, écrit avec des dialogues et, structurellement, il est très moderne. Même sur une scène de théâtre, son action est difficile à réaliser. Il est donc étonnant qu’un jeune compositeur ait écrit son premier opéra de plus de quatre heures sur ce sujet dramatiquement difficile. Le tout est en effet dispersé et l’intrigue et la psychologie ne sont pas totalement porteuses jusqu’à la fin. L’œuvre a été ensuite reprise sous une forme abrégée.

La réception de l’œuvre était fortement liée aux courants intellectuels de l’époque. Alors que, dans les cercles littéraires, on se demandait si le roman de Kivi était une description réaliste du paysan finlandais du milieu du 19e siècle, les cercles musicaux débattaient pour savoir si la langue parlée convenait à l’opéra. L’œuvre de Launis n’a pas la même importance dans l’art lyrique finlandais que le roman de Kivi dans  la littérature. Mais il faut toutefois apprécier sa volonté d’un renouveau sans préjugés, qui est d’ailleurs le reflet de sa personnalité de compositeur. Le changement de langage musical d’un opéra à l’autre est exceptionnellement frappant.

Livret

Le texte d’Armas Launis est fondé sur le roman Les sept frères (1870) d’Aleksis Kivi.

Action

Personnages : Les frères de Jukola Juhani, 25 ans (baryton), Tuomas (basse), Aapo (baryton), Simeoni (ténor comique), Timo (ténor), Lauri (ténor) et Eero, 18 ans (ténor) ; chantre (basse), commissaire (rôle parlé), la vieille de Männistö (rôle parlé), Venla, sa fille (soprano) ; villageois de Toukola; Aapeli de Kissala, clarinettiste, et Eenokki de Kuninkala (barytons) ; Mikko de Rajamäki, violoneux, tanneur, sa femme, leurs enfants (rôles muets), fils et filles de Toukola et autres gens.

L’action se déroule en Tavastie au milieu du 19e siècle.

1er acte

Les sept frères ont hérité de la ferme de Jukola qui est en train de se délabrer sérieusement. Ils décident de changer leur mode de vie et de chercher une fermière. Ils sont tous tombés amoureux de la même fille, leur voisine Venla. Ils veulent, en se battant, savoir qui va épouser Venla mais pensent, finalement, que c’est à elle de décider. Ils se rendent de  concert demander sa main. Le résultat est malheureux, elle les refuse tous. Ils imaginent que Venla ne les veut pas à cause de leur illettrisme. Donc, ils décident d’acquérir les rudiments de l’alphabet et se rendent auprès du chantre, également maître de l’école du village.

2e acte

Les leçons du chantre, malgré remontrances et punitions, ne donnent pas de résultats. Le chantre fâché finit par chanter tout seul les lettres de l’alphabet (A, B, C etc.) Seul le benjamin, Eero, plein d’entrain, arrive à épeler les lettres. Les autres restent toujours à A. Le chantre, désespéré, les laisse dans la salle fermée à clé pour la pause de goûter. Les hommes affamés se jettent sur la collation. En même temps, on entend dehors la clarinette d’Aapo de Kissala et le chant des jeunes hommes de Toukola qui se moquent des frères (« La force de sept hommes »). Les bonnes décisions s’envolent. La ferme sans fermière, les études inachevées et les railleries des voisins les rendent furieux. Ils décident de quitter leur maison natale et de se retirer dans des forêts lointaines. Ils cassent la vitre et s’enfuient de la salle fermée par le chantre.

Dans la région inhabitée les frères se sentent seuls et tristes. Le récit d’Aapo sur « la vierge blême » de la colline (« Jadis dans les grottes de cette colline habitait… ») rend superstitieux les frères, effrayés par un œil qu’ils voient dans l’obscurité. Ils essaient d’éloigner ce « messager du diable » avec des incantations, avant de se rendre compte que l’œil n’est que celui de leur cheval borgne. Quand les hommes se baignent dans l’étuve, l’eau se tarit et Juhani dit à Aapo de jeter de la bière sur le poêle. Après une bagarre entre eux, le feu se déclare, mais les hommes sont sauvés.

3e acte

En coulisse, on entend la Chanson des chasseurs (« Salut la forêt, salut la colline »). Le gibier, au fil des années, s’est raréfié. On a envoyé Simeoni et Eero dans la ville pour vendre des ustensiles. Ils rentrent dans un état misérable, ils ont bu tout l’argent gagné. Pour échapper à une correction, Simeoni invente l’histoire de son voyage dans la lune en compagnie de Lucifer en personne et il corse son récit de perspectives affreuses (« A peu près de ma taille… ») Les frères effrayés décident de retourner dans la vie normale.

4e acte

En cours de route vers l’église, les frères découvrent une vente aux enchères dans la cour de Tammisto. Quand Juhani s’étonne qu’on « ose faire une vente le dimanche, jour de fête », les frères sont  tournés en ridicule. Ils se mettent en colère et une bagarre éclate. Mais elle ne se prolonge pas car le chantre arrive. Il calme les frères qui invitent les gens réunis à une fête de réconciliation à Jukola.

Les frères arrivent dans la cour de la ferme délabrée de Jukola. Ils saluent leur maison natale avec ferveur. Juhani évoque leur mère (« Ô, si seulement la mère vivait encore »). Le chantre prononce un beau discours débordant de ferveur (« Diable »). Pour finir, tout le village célèbre les fiançailles de Juhani et Venla.

Représentation

Première le 11 avril 1913, Opéra finlandais et Théâtre national (Armas Maasalo)

1914, Festival de chant de Kuopio

1923, Opéra finlandais (Tauno Hannikainen)